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Pour un autre point de vue sur le corps et les relations fille/garçon

Dernière mise à jour : 4 mai 2021

Sexologue en cabinet libéral à La Couronne et membre du Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles à Angoulême, Marie-Noëlle Chaban a bien voulu répondre à nos questions sur le mouvement du 14 septembre.


La Guezette : Que pensez-vous des événements qui ont eu lieu en France le 14 septembre 2020 ?

Marie-Noëlle Chaban : l’envie des jeunes filles de s’habiller comme elles le veulent est juste, au même titre que tous les autres mouvements qui défendent, dans le respect, les droits de la femme. Car ce sont les engagements et les manifestations qui ont fait avancer la condition des femmes. Mais il faut savoir faire la différence entre tenues de villes et tenues de plage. D'autre part, il ne faut pas, lors des agressions, faire porter la faute aux filles, de la même façon que l’idée reçue selon laquelle « tous les garçons sont des violeurs potentiels » est fausse. Tout cela provient d’un problème d’éducation, il faut éduquer les jeunes au respect, à la sexualité, au consentement et au regard qu’ils portent sur autrui. Le fait d’interdire de porter des jupes, des décolletés, des tee-shirts à bretelles au lycée constituerait des dérives inquiétantes sur le futur des femmes. Par exemple, dans les années 70, les femmes étaient respectées dans la rue quand elles portaient des jupes ou des décolletés... Mais aujourd’hui, la plupart des personnes sifflées ou agressées dans la rue sont des femmes.

 

La Guezette : Que pensez-vous du fait que certains hommes, dans le cadre de l'exercice de leur métier, se disent gênés par la tenue de certaines femmes ou jeunes filles ?

Marie-Noëlle Chaban : Si aujourd’hui un homme, dans le milieu professionnel, n’est pas capable de détourner le regard devant le décolleté d’une fille, c’est une faute grave. Il est tout à fait possible de faire abstraction de la nudité : c'est ce que font les gynécologues hommes, qui ne marquent aucune réaction à la vue de l’appareil génital de la femme. Si le fait de porter une jupe, un crop top, un décolleté ou autre excite ou déconcentre les garçons, comme le répètent les CPE, il faut s’adresser directement aux premiers concernés : les garçons. Pour cela, pourquoi ne pas faire une enquête dans le lycée pour savoir si les garçons sont vraiment gênés, excités, incapables de détourner le regard à la vue d’une jupe, d’un décolleté ou d'autre chose encore ? Et il faut se demander pourquoi les filles veulent porter ces vêtements : parce qu’il fait chaud ? Parce qu’elles sont bien dans leur corps ? Parce qu’elles veulent draguer ? Les limites à ne pas franchir doivent être discutées entre les lycéens et les lycéennes pour savoir où commence l’indécence. Les jeunes doivent avoir la parole.


 

La Guezette : Comment définiriez-vous la notion de « consentement » ?

Marie-Noëlle Chaban : Le consentement, c’est le fait de donner son accord à une action, à un projet. Mais ce consentement ne concerne pas seulement le passage à l’acte ! C’est aussi se demander comment entrer en relation avec une personne (aller voir la personne, passer par les réseaux sociaux, envoyer des SMS,…), comment montrer à l’autre qu’il nous plaît, comment se faire aborder ou comment aborder l’autre, comment accepter de se faire regarder, toucher, embrasser… Voilà, c’est aussi tout cela le consentement. La tenue ne justifie en aucun cas les agressions, quelle qu’elle soit ! Il n’y a pas de place pour les « elle l’a bien cherché, c’est mérité ».


 

La Guezette : Xavier Pommereau [psychiatre interviewé dans un précédent article - ndlr] a dit lors de son interview que les hommes étaient des « prédateurs ». Ces propos ont surpris l’équipe de rédaction, est-ce que vous êtes d’accord avec ce qu’il a dit ?

Marie-Noëlle Chaban : C’est une conclusion très généraliste : certes, des hommes sifflent dans la rue, draguent lourdement, mais tous les hommes ne sont pas comme cela. Il est clair que certains hommes regardent les femmes de manière insistante, voire même dominatrice, mais encore une fois ils ne sont pas tous comme cela. Si nous considérons que les hommes sont des prédateurs cela sous-entend que les femmes sont des proies potentielles, que les femmes n’auraient pas de besoins. Or les femmes ne sont pas que la délicatesse, la douceur, elles ne sont pas que sentimentales, romantiques, elles ne sont pas que pur esprit. Aujourd’hui, les femmes peuvent avoir des plans-culs, des coups d’un soir. Et dans la même logique les hommes ne pensent pas qu’au sexe, ne sont pas tout le temps forts et courageux... Ce ne sont que des stéréotypes liés aux genres. Il faut laisser la possibilité aux personnes de se définir elles mêmes. Alors par respect pour les hommes, affirmons qu’ils ne sont pas des prédateurs, qu’ils ne sont pas tous comme cela, et que les considérer comme tel est insultant.



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